mercredi 1 janvier 2014

JMG Le Clézio, voyageur et citoyen du monde

Jean-Marie Gustave Le Clézio , France-États-Unis 

JMG Le Clézio, prix Renaudot 1963, Grand prix de l'Académie française 1980, prix Nobel de littérature 2008
                                    
JMG le-clezio-le-proces-verbal.jpg  JMG Le Clézio et sa femme en 1963

Jean-Marie Gustave Le Clézio entre ses "terres d'écrivain" et ses "racines aquatiques". D'origine bretonne et mauricienne, il naît au bout de la Méditerranée à Nice le 13 avril 1940, de parents mauriciens, d'un père d'origine anglaise et d'une mère française née à Paris. Un franco-mauricien mâtiné d'anglais, à la double nationalité. Double aussi, homme de terre et homme de mer, son port d'attache sera la langue française : « Pour moi qui suis un îlien, quelqu'un d'un bord de mer qui regarde passer les cargos, qui traîne les pieds sur les ports, comme un homme qui marche le long d'un boulevard et qui ne peut être ni d'un quartier ni d'une ville, mais de tous les quartiers et de toutes les villes, la langue française est mon seul pays, le seul lieu où j'habite. » [1] Il passe les premières années de son enfance à Roquebillière, petit village situé à la rive droite de la Vésubie dans l'ambiance morose de la seconde guerre mondiale.
 
A sept ans, il va découvrir l'Afrique, après un voyage en bateau qui le conduit avec sa mère au Nigéria où il va retrouver son père, situation qu'il reprendra dans son roman "Onitsha" en 1991. [2] Cette Afrique qui le fascine toujours et dont il dit dans "L'Africain" : « L'arrivée en Afrique a été pour moi l'entrée dans l'antichambre du monde adulte. » [3] La famille s'installe de nouveau à Nice en 1949 et le jeune garçon habitué à la vie africaine se sent mal à l’aise, mal intégré dans cette ville où ils vivent plus comme des Mauriciens ou des Africains.

Il poursuit ses études au lycée Masséna, tâte de la bande dessinée et lit beaucoup. Il préfère les récits d'explorateurs de Kipling ou de Conrad, fréquente le ciné-club Jean Vigo où il découvre tout un univers cinématographique fascinant quoique très éclectique et participe au "Club des Jeunes" où il rencontre des artistes comme Ben. Il se partage alors entre Nice, Bristol et Londres quand il publie à 23 ans son premier roman, "Le Procès-verbal" qui recevra le prix Renaudot en 1963 et sera le point de départ d'écrits marqués par sa colère, sa révolte contre un monde angoissant, dominé par la violence et l'argent, prêt à sacrifier la nature et les plus faibles.
 
En 1967, il est en Thaïlande comme coopérant d'où il est expulsé pour avoir dénoncé la prostitution enfantine. L'armée l'envoie alors au Mexique, à l'Institut d'Amérique Latine où il découvre, émerveillé, la vie des Indiens. Pendant 4 ans de 1970 à 1974, il partagera la vie de deux groupes, les Emberas et les Waunanas dans la jungle panaméenne. Là, il retrouve un meilleur équilibre, une sérénité retrouvée qui donnent à son œuvre une nouvelle impulsion. Il parcourt ensuite le pays, vit avec d'autres peuplades comme les Huichols dont il apprend la langue, découvre les textes sacrés et publiera en 1977 une traduction des Prophéties du Chilam Balam, ouvrage sur les mythes amérindiens.

Il constate aussi amèrement que cette richesse a été en partie détruite par l'impérialisme des conquistadors, ce qui le conforte dans le rejet d'une certaine forme de civilisation occidentale dont il avait déjà vu les conséquences en Afrique. Devenu un fin connaisseur de la région du Michoacan située au centre du Mexique, il écrira une thèse d'histoire centrée sur ce sujet et ira ensuite enseigner aux à l'Université d'Albuquerque aux États-Unis dans l'état du Nouveau-Mexique où il s'établit avec sa femme Jémia et leurs deux filles.
 
JMG le-clezio-et-sa-femme-.jpg Le couple Le Clézio pour la remise du prix Nobel
 
Au début du XXe siècle, des problèmes économiques et familiaux obligent la famille à revenir en France. Son grand-père quitte ses fonctions de juge et part sur l’île Rodrigues à la recherche d'un hypothétique trésor et vers ses 15 ans, Jean-Marie va découvrir dans une valise les plans et les croquis amassés par son grand-père pour préparer l’expédition. Il se servira de cette histoire familiale pour écrire sa "série mauricienne" qui comprend essentiellement Le Chercheur d’or en 1985, Voyage à Rodrigues l'année suivante, La Quarantaine en 1995, Révolutions en 2003 et Ritournelle de la faim en 2008. Son intérêt pour la langue créole ne se démentira pas et il publiera avec sa femme Jemia, Les Sirandanesen 1990. Sa conception de l'écriture transparaît dans ce texte tiré de L’extase matérielle : « Les idées sont toutes objectives. C’est le réel qui donne naissance à l’idée, et non pas l’idée qui exprime ce qu’il y a de concevable dans la réalité. »
 
S'il vit assez souvent à Albuquerque, à la frontière des USA et du Mexique, où il enseigne, il séjourne aussi dans ses "lieux de mémoire" comme disait Bernard Clavel, à Nice la ville de son enfance qui est aussi une ville frontière entre France et Italie, à l’île Maurice, berceau de la famille et île multiculturelle, la Bretagne aussi, avec une certaine nostalgie de ses origines, ce qui nous vaut cette remarque : « je vis dans les lisières, entre les mondes ». Il retourne aussi volontiers à Paris y humer « l'air du temps », où il écrira en 1997 son roman Poisson d’or sur le thème de l’immigration en France et fait quelques séjours comme en Corée du Sud en 2008 pour enseigner la littérature française.

Notes et références

  1. ↑ Il écrira aussi : « Je suis assez itinérant, instable, pas très sûr de l'endroit où je veux habiter. »
  2. ↑ "Onitsha", roman, Gallimard, Paris, 1991, 250 pages, Isbn 2-07-072230-9
  3. ↑  "L'Africain", portrait de son père, Mercure de France, « Traits et portraits », Paris, 2004, 103 pages, ISBN 2-7152-2470-2.

Voir aussi

Le Clézio et son œuvre,     Leduc et Le Clézio,     Voyage à Rodrigues

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